Les designers-chercheur·euse·s sont de plus en plus sollicité·e·s pour intervenir dans des institutions scientifiques, professionnelles, associatives ou étatiques. Du fait de leurs compétences plurielles et de leurs statuts hybrides et souvent peu balisés, ils entretiennent alors des rapports complexes avec ces institutions et leurs publics, en prise avec des politiques, des règles de fonctionnement, des usages et des demandes multiples et parfois contradictoires. À travers cette diversité de situations, ce sont les rôles et postures de chaque partie (la ou le designer-chercheur·euse et l'institution dans laquelle elle ou il intervient) qui se trouvent mutuellement et constamment interrogés. Alliance, résistance, friction, absorption, transformation : voici autant de dynamiques éprouvées empiriquement qui révèlent la diversité des formes d'interaction de la recherche en design avec des institutions.
Cette discussion vise à spécifier les enjeux, opportunités et limites de telles interactions, en prenant de la distance avec des discours défaitistes (les possibilités d'intervention du design seraient nécessairement limitées, voire « récupérées » dans les contextes institutionnels) ou messianiques (le design serait une nouvelle science de transformation des organisations) pour préférer une description nuancée et située à partir de quelques expériences de terrain. En se fondant sur une série d'anecdotes racontant des situations d'intervention dans des institutions par les participant·e·s, nous discuterons de tensions que nous avons pu éprouver à travers nos expériences structurées autour de 4 thématiques : projeter/déprojeter, (se) placer / (se) déplacer, servir/desservir, affecter / désaffecter.
Organisation et modération: Julie Blanc
Avec le soutien de l'EUR ArTeC
Intervenant·es
Loup Cellard
Loup Cellard vient de terminer sa thèse au Centre for Interdisciplinary Methodologies (Warwick, UK). En tant que chercheur postdoctoral au ARC Centre of Excellence for Automated Decision-Making and Society (Melbourne Law School, AU) il démarre une enquête sur les implications écologiques de la régulation des algorithmes et de l'intelligence artificielle. Ses recherches se situent à la croisée de la recherche en design, des Sciences and Technology Studies (STS) et des approches matérialistes des media studies. Ses recherches portent sur les algorithmes administratifs, la transformation numérique du secteur public, la visualisation de données ainsi que les méthodes de recherches inventives croisant les sensibilités de l'art, du design, des sciences et des cultures numériques.
Pauline Gourlet
Pauline Gourlet est designer d'interaction, chercheure et enseignante. Elle a fondé en 2013 le collectif de design L’Atelier des Chercheurs, qui conçoit des outils libres et collabore avec des partenaires variés (communautés éducatives diverses, fablabs/maker spaces, théâtres, musées, administrations publiques…). Pauline a récemment travaillé aux Nations Unies à New York, après avoir obtenu un doctorat en ergonomie en 2018 à l'Université Paris 8, en partenariat avec l'Ensadlab. Elle était chercheure invitée à The New School (NYC), de 2017 à 2018. Depuis mars 2021, Pauline est post-doctorante au médialab de Sciences Po, où elle étudie les controverses liées à l’intelligence artificielle, recherche dans laquelle elle hybride Design Participatif et STS. Elle enseigne également régulièrement le design et les méthodologies de recherche en France et à NYC.
Robin de Mourat
Robin de Mourat est designer de recherche en méthodes numériques au laboratoire médialab de Sciences Po, où il contribue à mettre en dialogue activités de design et pratiques d'enquête en sciences sociales par le biais de l'expérimentation de protocoles de recherche inventifs et d'outils numériques pour l'équipement des enquêtes et leur mise en public. Il a soutenu en 2020 à l'Université Rennes 2 une thèse en Esthétique portant sur le rôle des pratiques de publication dans les recherches en SHS, à l'intersection entre recherche en design, histoire et anthropologie des pratiques savantes et de l'écriture, media studies et épistémologie des sciences humaines et sociales.
Julie Blanc
Julie blanc et design graphique et doctorante. Elle prépare depuis 2018 une thèse en ergonomie et design graphique au laboratoire Paragraphe (Université Paris 8) et à EnsadLab-Paris dans le cadre de l’EUR ArTeC. Ses travaux de recherche portent sur l'activité des designers graphiques qui utilisent les technologies du web pour la composition d'objet éditoriaux multisupports. Elle participe au développement de Paged.js pour le Cabbage Tree Lab, une bibliothèque JavaScript prenant en charge l'utilisation de CSS pour l'impression en se reposant sur les standards du W3C.
Le cycle de conférence « Pratiques de la recherche en design »
Avec le cycle de conférence « Pratiques de la recherche en design », l'association Design en Recherche propose de montrer la recherche en train de se faire. Quelles questions les doctorant·es et jeunes chercheur·euses en design se posent-ils aujourd'hui ? Quels thématiques et enjeux animent leurs travaux ? Comment leurs expériences de designers est-elle intégrée au travail théorique, et vice-versa ?
La recherche en design est une discipline récente dont la reconnaissance institutionnelle interroge beaucoup les acteurs de ce milieu depuis une dizaine d'années. Le monde du design a d’ailleurs toujours été réticent à trouver une définition commune. Si les propositions avancées sont quelques fois complémentaires, elles peuvent aussi s’opposer. Par ces conférences, il ne s’agit donc pas de définir ce qu'est une recherche en design (recherche-création, Practice-based research, etc.), mais plutôt montrer comment elle se fait, concrètement, aujourd’hui, grâce à des exemples éclectiques issus des expériences vécues par les chercheur·euses en design.
En nous appuyant sur les pratiques singulières engagées par les chercheur·euses de notre milieu, nous aimerions rendre compte de la diversité des problématiques posées et des méthodologies propres à la recherche en design. Il s‘agit également de montrer les différentes manières dont le travail des designers est intégré à la dynamique universitaire. En invitant ces chercheur·euses à témoigner, nous souhaitons ouvrir des espaces de réflexions autour de thématiques qui nous animent et nous semblent indispensables à aborder dans la société d'aujourd'hui.
Ce projet est destiné à un public aux profils multiples. D’abord aux jeunes chercheur·euses qui pourront bénéficier par ces conférences d’un espace de travail et de discussion ouvert. Mais aussi aux professionnel·les du milieu, aux enseignant·es et aux publics non initiés qui y trouveront des démonstrations variées de la recherche universitaire en design.
Les autres conférences du cycle: